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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

time dévouée. Croyons encore ici un admirateur comme Cicéron. Il avait vu au théâtre de Rome ce personnage renouvelé par le poëte, avec des nuances plus pures et plus douces, qui le faisaient s’écrier : « Ô poésie touchante ! délicieuse morale ! » Il avait entendu ces vers, mêlés sans doute à la terreur de la prédiction qui tout à coup éclatait dans le palais de Priam :

Hécube.

« Pourquoi cette soudaine frayeur et ces yeux enflammés ? Où est cette jeune fille naguère si calme, dans sa modestie virginale ?

Cassandre.

Ô mon excellente mère, la meilleure des femmes ! Je suis envoyée pour des révélations mystérieuses. Ce n’est ni dans la folie ni malgré moi qu’Apollon m’appelle à dire le destin. Les vierges de mon âge se sont troublées de ce que je fais, à cause de mon père, cet homme si vertueux. Ma mère, j’ai pitié de toi et honte de moi-même. La meilleure postérité de Priam, à tes yeux, c’est une autre que moi : ma douleur, c’est que je sois importune et eux utiles, que je gêne et qu’ils plaisent. »

Bientôt, d’une douleur en apparence résignée, la jeune fille, emportée par sa terreur prophétique, s’élève à ce langage :

« La voici, la voici la torche enveloppée de flamme et de sang : elle resta cachée, longues années. À l’aide, citoyens, accourez l’éteindre. » Puis, avec ce