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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

grec, elle était bien loin d’en renouveler l’éclat lyrique. Rien de cette puissance de mélodie, de ce chœur aux cent voix, de ce dithyrambe en action si marqué dans Eschyle, n’était possible aux rudes essais du théâtre romain.

Ce qu’à cet égard nous supposons avec certitude pour les premiers temps de Rome, est confirmé par un témoignage précis, pour l’époque même de sa grandeur et de son luxe. Vitruve le remarquait au siècle d’Auguste : « Dans les théâtres de Rome, la scène proprement dite (pulpitum) était plus vaste que celle des Grecs, parce que toute la représentation s’y concentrait, l’orchestre étant occupé par les siéges des sénateurs[1]. »

Nous croyons presque lire ici ce que dit Voltaire avec humeur de ces banquettes occupées par de jeunes seigneurs à l’ancien Théâtre-Français, et restreignant la scène de manière à gêner tout grand appareil de spectacle et à faire manquer souvent l’effet dramatique.

Que s’il en était ainsi sur ces vastes théâtres élevés par la rivalité magnifique de Pompée et de César, combien les premiers essais de drames avaient-ils dû se produire à Rome avec moins de pompe encore, et plus dénués d’éclat lyrique et d’harmonie ! Ainsi, lorsque ce

  1. Ita latius factum fuerit pulpitum, quàm Græcorum, quòd omnes artifices in scenâ dant operam. In orchestrâ autem senatorum sunt sedibus loca designata. Vitruv., l. v, c. 6.