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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

que Platon en cite quelques vers, mais évidemment reprise et accrue plusieurs fois, à l’époque des trois premiers Ptolémées, et dans cette ville d’Alexandrie, où Clément et saint Justin martyr les recueillirent plus tard comme un germe antique de la foi naturelle, qu’on aimait alors à rapprocher des vérités de la foi révélée. Tels sont, par exemple, ces graves accents redits par saint Justin, et qu’Eusèbe, avec quelques variantes, tirait des livres du Juif Aristobule adressés au second Ptolémée :

« Je parlerai pour ceux qui ont le droit d’entendre[1]. Fermez les portes à tous les profanes également. Et toi, écoute, fils de la Lune porte-flambeau, ô Musée ! car j’énonce la vérité, et il ne faut pas que ce qui avait auparavant apparu à ton esprit te prive d’une ère nouvelle et propice. Les yeux attachés au Verbe divin, repose-toi sur lui. Réglant le fonds intellectuel de ton cœur, monte heureusement aussi par la route détournée, et contemple l’unique roi de l’univers. Il est un, né de lui-même ; il a enfanté de lui seul toute chose ; et il circule lui-même dans tous les êtres ; et nul des mortels ne le voit ; et lui-même, il les voit tous. C’est lui qui, du milieu du bien, envoie le mal aux hommes, et la guerre avec ses frissons glacés, et les douleurs abondantes en larmes. Il n’en existe pas un autre semblable, en dehors du

  1. Orph. Hym. Procli, etc., p. 132.