Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/282

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
274
ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

d’autres hymnes de Callimaque, qui semblent, à la première vue, tout mythologiques. Là même, l’idolâtrie s’est empreinte du monothéisme hébreu. Dans Pindare, Apollon est le dieu de Delphes, le dieu des athlètes vainqueurs et des poëtes. Il se plaît aux amours des nymphes qu’il poursuit, et aux merveilles des arts qu’il inspire. Dans Callimaque, soit qu’il s’agisse d’un libre chant médité par le poëte, ou d’un hymne destiné à quelque fête de l’ancien culte, aux Thesmophories, à l’inauguration des Bains de Pallas ou aux processions de Délos transplantées sur les bords du Nil, le langage est plus abstrait et plus austère, la croyance plus pure et mêlée d’une influence nouvelle.

Vous n’avez plus ici ni Delphes, ni Olympie, ni cette tradition des lieux, ces temples, cette terre sacrée qui ravissait le poëte et lui donnait l’enthousiasme, en même temps que la lyre. Mais un art nouveau prête un sens moral aux pompes et aux symboles d’une solennité presque étrangère. « Comme la branche de laurier d’Apollon, comme le sanctuaire entier a tressailli ! Arrière tout criminel ! Oui, Phébus d’un pied favorable a touché le seuil. Ne voyez-vous pas ? Le palmier de Délos s’est doucement incliné tout à coup, et le cygne fait entendre un mélodieux accent dans les airs. Panneaux des portes, tombez, et vous aussi, verrous qui les fermez ! car le dieu n’est pas loin. Mais vous, enfants ! montez la mélopée sur le ton du chœur. Apollon n’apparaît pas à tous,