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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

vés avec autant d’habileté que d’ardeur. L’épopée même, que n’avait plus osée le second âge de création de la Grèce, l’âge des Eschyle et des Pindare, fut reprise avec une industrie d’imagination que devait imiter Rome ; et, dans l’arrière-saison de sa langue, Apollonius de Rhodes sut donner à la passion de Médée une verve de poésie et d’amour, dont les couleurs enrichissaient plus tard l’idiome jeune encore et le génie de Virgile.

Ce n’est pas tout : par une témérité qui n’a pas laissé de monuments, le Muséum d’Alexandrie ne craignait pas de remanier les grands sujets et de refaire les grandes œuvres des poëtes tragiques d’Athènes.

Sous cette forme, avec cette émulation de l’antiquité, et sans doute aussi sur des souvenirs plus récents, Lycophron avait composé plus de quarante tragédies ; ce qui lui valut, dans les vers d’Ovide, l’épithète de porteur de cothurne[1] :

Utque cothurnatum cecidisse Lycophrona narrant.

De tant de tragédies, il ne s’est conservé que quatre vers des Pélopides, où se rencontre une forte et mélancolique image :

« Les infortunés[2], quand la mort est loin, l’appellent de leurs vœux ; mais, lorsque vient sur nous le

  1. Ovid. in Ib., v. 531.
  2. Stob. Florileg. Tit. 119.