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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

Nulle part, on le sait, cette fantaisie lyrique du poëte comique d’Athènes n’a plus libre carrière que dans ses pièces fabuleuses, les Nuées, les Oiseaux. Enthousiasme et bouffonnerie, il peut tout mêler ; sa gaieté respire l’ivresse des bacchanales ; et, du milieu de la parodie, il est emporté jusqu’au Dithyrambe. Quelle poésie légère, insaisissable, dans ce chœur des Nuées :

« Nuées éternelles[1], élevons-nous, dans notre mobile et vaporeuse essence, du sein paternel de l’Océan tumultueux, sur les cimes ombragées des hautes montagnes, d’où nous voyons au-dessous de nous de lointaines perspectives, et la terre sacrée fertile en moissons, et les frémissements des fleuves divins, et la mer bruyante ; car l’œil infatigable de l’éther brille d’une éclatante lumière ; et, quand nous avons écarté l’ombre épaisse des pluies, nous donnons à nos regards qui percent au loin, pour vision éternelle, la terre…

Vierges chargées d’orages, allons, sur la terre fertile de Pallas, voir cette contrée de Cécrops, virile et pleine de charme, où sont célébrés les mystères ineffables, où la demeure sacrée s’ouvre, au milieu des cérémonies saintes, et où les offrandes des dieux, les temples, les statues, les processions à l’honneur des immortels, les victimes couronnées

  1. Aristoph. Nub. p. 82 et 83.