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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

teur de ma perte ! Car tu m’as perdue volontairement une seconde fois.

le chœur.

Elle va prophétiser sur ses propres malheurs. L’inspiration divine est restée à son âme asservie par l’esclavage.

Cassandre.

Apollon ! Apollon ! dieu des chemins publics, auteur de ma perte, où m’as-tu conduite ? vers quelle demeure ?

le chœur.

Vers celle des Atrides. Si tu l’ignores, je te l’apprends ; et tu ne diras pas que c’est un mensonge.

Cassandre.

Eh bien ! tu me conduis vers une ennemie des dieux, la confidente des assassinats domestiques, la meurtrière d’un époux ; tu me conduis sur un sol sanglant. »

Quelle puissance dramatique dans cette prophétie, non pas régulière et prévue comme celle de Joad, mais éclatant du fond de l’esclavage et du désespoir, et relevant soudain la captive au-dessus de ses maîtres ! Après de sinistres retours sur la maison des Atrides, la prophétesse, animée par les interruptions du chœur, devient plus intelligible.

Cassandre.

« Hélas ! malheur ! malheur ! quel est cet appareil ? Est-ce quelque filet d’enfer ? Le filet, c’est l’épouse