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ESSAIS SUR LE GÉNIE DE PINDARE

la sépulture qui conservait sur ce rivage les restes d’une partie d’entre eux, Simonide disait avec une familière énergie : « Quand la Grèce entière se tenait sur la lame d’un couteau, au prix de nos vies, nous l’avons délivrée, nous ensevelis ici. Nous avons frappé les Perses au cœur, les accablant de maux, souvenir de leur affreuse défaite sur mer. Salamine garde nos ossements ; et notre patrie, Corinthe, pour prix de notre fidèle service, a élevé ce monument. »

Ailleurs, sur la lyre du même poëte, c’est la Grèce entière qui est célébrée, soit dans la dédicace d’un temple à Jupiter Libérateur, soit dans l’éloge de la part que même les tyrans grecs de Sicile avaient prise à la lutte commune contre les barbares :

« Depuis, dit le poëte, que la mer a séparé l’Europe de l’Asie, et que l’impétueux Mars excite les guerres des mortels, jamais il ne fut fait ici-bas par les hommes plus grand effort qu’aujourd’hui, et sur le continent et sur mer. Ceux, en effet, qui avaient tué sur terre des milliers de Mèdes ont pris sur mer cent navires phéniciens chargés d’hommes. L’Asie poussa un long gémissement, se sentant ainsi frappée à deux mains par la guerre. »

On le croira sans peine, ce n’était pas seulement par ces courtes épitaphes que devait se marquer l’admiration du poëte pour la gloire de son pays. Souvent il ne nous est resté qu’un échantillon, qu’un refrain détaché de ce que répétait la Grèce. Je le croirai, par exemple,