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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

crustés au bois par des barres et des chevilles ; et soudain, par ces portes, les vierges lancèrent le char et les coursiers. La déesse bienveillante m’accueillit ; et, de sa main, elle me prit la main droite ; et elle me dit ces mots :

Ô jeune homme, qui fais route avec des conductrices immortelles, dont les coursiers t’amènent dans ma demeure, réjouis-toi[1] ; car ce n’est pas une mauvaise destinée qui t’a fait prendre cette route, en dehors de la voie battue des hommes ; c’est Thémis elle-même et la Justice. Il faut que tu apprennes à connaître toutes choses et le fond réel de la vérité persuasive, et les opinions des mortels qui reposent non sur une foi véridique, mais sur l’erreur ; et tu connaîtras ainsi, comment il faut marcher prudemment à travers le tout, en faisant l’épreuve de toute chose. »

En tête de cette philosophie poétique dont la Grèce allait recueillir les leçons, il reste à placer le personnage demi-fabuleux de Pythagore. Ce qu’il semble avoir emprunté aux doctrines religieuses de l’Inde devient original en lui. Né à Samos, voyageur en Orient et législateur de villes grecques en Italie, sa science des nombres,

  1. Χαῖρ’, ἐπεὶ οὔτι σε μοῖρα κακὴ προὔπεμπε νέεσθαι
    τήνδ’ ὁδόν, ἦ γὰρ ἀπ’ ἀνθρώπων ἐκτὸς πάτου ἐστίν·
    ἀλλὰ Θέμις τε Δίκη τε. Χρεὼ δέ σε πάντα πυθέσθαι,
    ἠμὲν ἀληθείης εὐπειθέος ἀτρεμὲς ἦτορ,
    ἠδὲ βροτῶν δόξας, τῆς οὐκ ἔνι πίστις ἀληθής,
    ἀλλ’ ἀπάτη· καὶ ταῦτα μαθήσεαι, ὥς τε δοκοῦντα
    χρὴ δοκίμως ἰέναι διὰ παντὸς, πάντα περῶντα.