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ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

n’est pas dans la destinée que l’homme échappe à la mort, quand même pour aïeux il a des immortels. Souvent celui qui, à travers la bataille et le bruit des traits, a passé sain et sauf, la mort le surprend à son foyer. Celui-là n’est pas cher au peuple ; il n’en est pas regretté : mais cet autre, petits et grands le pleurent s’il succombe. L’homme de courage met en deuil le peuple par sa mort ; et, vivant, il est l’égal des demi-dieux. On le contemple des yeux comme un rempart, car seul il vaut un grand nombre. »

Tyrtée, dont l’âge, déterminé par son action dans la guerre de Messénie, se rapporte au sixième siècle avant notre ère, est contemporain des sept sages de la Grèce et antérieur à Eschyle. La mâle énergie de ses chants recommandait par-dessus tout, et de préférence même aux jeux guerriers et brillants de la Grèce, la pratique des armes.

— « Je ne tiendrais pas en estime un homme[1] pour son agilité à la course ou sa vigueur à la lutte, ni s’il avait la taille et la force des Cyclopes, ni s’il devançait la vitesse de l’aquilon, ni s’il était plus gracieux de visage que Tithon ou plus riche que Midas et Cinyre, ni s’il était plus roi que Pélops, fils de Tantale, ni s’il avait la langue mélodieuse d’Adraste, ni quand il aurait toute gloire, hormis la force guerrière.

  1. Poet. lyr. græc., ed. Bergk., p. 310.