Page:Villemain - Essais sur le génie de Pindare, 1859.djvu/11

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
3
ET SUR LA POÉSIE LYRIQUE.

premiers poëtes grecs, ni pour l’analyse du sentiment poétique, à bien des traits originaux, à bien des témoignages précieux de Pindare, qui partout, dans ses hymnes, se montre le premier croyant à l’authenticité d’Homère et comme le prêtre de son temple.

Même dans les détails d’érudition qu’il rassemble, il paraît ignorer ce qu’un hymne de Pindare aurait du lui apprendre : s’indignant qu’on ait pu croire les chants du poëte grec un amas de chansons « cousues ensemble, et par là même nommées rapsodies, » il répond avec autorité : « Ce mot ne vient point de ῥάπτειν, « qui signifie joindre, coudre ensemble, mais de ῥάβδος qui veut dire une branche ; et les livres de l’Iliade et de l’Odyssée furent ainsi appelés, parce qu’il y avait autrefois des gens qui les chantaient, une branche de laurier à la main, et qu’on appelait à cause de cela les Chantres de la branche. » À la bonne heure ! Mais, en réfutant de si haut les malencontreux partisans de la première étymologie, Boileau, pour être juste, n’aurait pas du laisser en oubli ce curieux début de la deuxième Néméenne, où sont désignés les homérides, comme des chanteurs de vers épiques recousus :

 Ὁμηρίδαι,
Ῥαπτῶν ἐπέων τὰ πόλλ’ ἀοιδοί,

expression qui semble amener le nom de Rapsodes, en même temps que la pensée de Pindare réduit évidemment au rôle de récitateurs errants ces hommes,

1.