Page:Ville - Le chef des Hurons, 1900.djvu/87

Cette page a été validée par deux contributeurs.
87
hécatombe de sauvages

— Sur quoi basez-vous votre supposition ?

— Ce n’est pas une supposition, c’est une certitude.

— Mais encore…

— Tant qu’a duré le combat, interrompit le chasseur, aucun blanc n’a paru dans les rangs ennemis.

— Vous avez peut-être raison, mais dans quel but ces misérables auraient-ils commis ce rapt ?

— Uniquement pour obtenir une rançon.

— Mais ma fille, pourquoi ne l’ont-ils pu emmenée ?

— Parce que, portant une femme évanouie, ils ne pouvaient s’éloigner assez rapidement. Il est même probable qu’ils ne l’ont abandonnée que pour fuir, au moment où, la bataille terminée, nous sommes revenus à la Mission.

— Que pensez-vous de cela, chef ? demanda M. de Vorcel à Taréas.

— L’ami de Taréas est jeune, répondit le chef, mais sa sagesse est grande !

— Ainsi, vous croyez aussi que mon fils est entre les mains des bandits.

— Oui. Pendant que les Indiens se faisaient tuer bravement, les vautours emportaient leur proie.

— Mon pauvre Louis ! sanglota le colonel en laissant tomber avec accablement sa tête sur sa poitrine.

— Courage, mon colonel, dit Sans-Peur d’une voix énergique, je vous rendrai votre fils.

M. de Vorcel prit dans les siennes les mains du chasseur, en disant :

— Faites cela, mon ami, et ma fortune est à vous !

— Mon colonel, dit froidement Sans-Peur, je ne relèverai pas ce que vos paroles ont d’offensant pour moi, car la douleur vous égare.

— Pardonnez-moi, je souffre tant !… Vous êtes, je le sais, un homme dont les services ne se paient point avec de l’argent.

— Je vous aime mieux ainsi, dit en souriant le chasseur.