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le chef des hurons

La plaine était remplie de guerriers qui, à mesure qu’ils avançaient, faisaient place à d’autres, comme si la forêt les eût enfantés.

Plus de six mille Indiens étaient là, rangés en bataille, et il en venait toujours.

Le colonel jugea rapidement la situation.

Vaincre était impossible. La Mission devait fatalement être engloutie sous ce flot humain qui s’avançait. Il fallait donc mourir ; d’ailleurs, tous le comprenait.

— Mes amis cria M. de Vorcel, d’une voix qui fut distinctement entendue de tous, vendons chèrement notre vie. Faisons-nous de belles funérailles !… Feu partout !

Une détonation effroyable retentit.

La colline sembla trembler sur sa base.

Les sauvages poussèrent leur terrible cri de guerre et répondirent par une grêle de flèches et de balles, s’élançant au pas de course vers la colline, dont ils commencèrent à gravir la pente.

Tout à coup, six barils de poudre, auxquels étaient attachées des mèches allumées, furent jetés par-dessus, les remparts et roulèrent le long de la pente avec une rapidité vertigineuse.

Les sauvages ouvrirent leurs rangs pour laisser passer ces objets dont ils ne devinaient pas la nature. Mais, bientôt, six détonations formidables ébranlèrent les airs, et plusieurs centaines de guerriers, hachés, broyés, jonchèrent le sol.

Les Indiens s’enfuirent, affolés et hurlant, mais la voix de leurs chefs les ramena au combat, et ils s’élancèrent de nouveau vers la colline, dont le sommet ressemblait au cratère d’un volcan.

Pourtant, malgré l’héroïque résistance des blancs, les Peaux-Rouges gagnaient du terrain. Plusieurs avaient déjà atteint les retranchements, d’où on les avait rejetés à coups de baïonnettes. Tout à coup, des cris d’épouvante dominèrent le tumulte de la bataille : sur la gauche des indiens, une