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UNE VENGEANCE INDIENNE

mur, je m’apprêtais à repousser l’attaque d’une dizaine de ces bandits, sur un ordre de leur chef ils se jetèrent sur moi tous à la fois et me désarmèrent, après quoi je fus solidement garrotté. Alors, le chef s’approcha de moi et me dit :

— Chien de Visage-Pâle, quand tu reverras ton maître, tu lui diras que Niocébah est un chef puissant que l’on ne fouette pas en vain.

Puis, sans ajouter une parole, il partit avec sa troupe, emmenant votre fils.

— Mais ma fille ! s’écria le colonel, qu’est-elle devenue ?

— Je ne l’ai pas vue.

— Voyons, mon colonel, dit le chasseur, comprenez-vous quelque chose aux paroles que vient de vous rapporter votre domestique ?

— Oui, dit M. de Vorcel d’une voix sombre, en laissant tomber tristement sa tête sur sa poitrine ; oui, j’ai compris. Oh ! le misérable !

Et le colonel, s’absorbant dans de pénibles pensées, revit, dans tous ses détails, une scène qui s’était passée devant la villa quelques jours auparavant, et où il avait été d’une imprudence extrême.

Profitant d’une journée de liberté, M. de Vorcel était monté à cheval au lever du soleil et s’était rendu près de sa famille. Mais en arrivant devant la villa, il avait aperçu un Indien, sale et déguenillé, qui semblait examiner attentivement l’habitation.

Le colonel, dont la douceur n’était pas la vertu dominante, poussa son cheval vers le Peau-Rouge, à qui il dit d’une voix brusque :

— Que fais-tu là ?

— Moi ? répondit l’Indien, rien.

— Alors, passe ton chemin au lieu d’espionner ainsi les gens.

— La route n’est-elle pas à tout le monde ?

— Ah ! ça, drôle, je crois que tu te permets de raisonner.

— Les Visages-Pâles sont vifs, mais les Indiens dédaignent