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LE CHEF DES HURONS

— Eh ! l’ami lui cria le sergent, où donc allez-vous si vite ?

— Je me rends près du colonel de Vorcel, répondit Sans-Peur ; pouvez-vous m’indiquer la maison qu’il habite ?

— Certainement, et si c’est pour le service du roi, un de mes hommes va vous y conduire.

— Soit, mais dépêchez-vous, car je suis pressé.

— Bellerose, dit le sergent en s’adressant à un de ses soldats, conduis ce chasseur chez le colonel ; tu nous rejoindras au poste.

Dix minutes plus tard, Sans-Peur frappait à la porte d’un hôtel de somptueuse apparence, et bientôt un domestique venait ouvrir en se frottant les yeux et en grommelant :

— En voilà une idée de venir ainsi réveiller les gens en milieu de la nuit.

— Trêve de récriminations, dit sèchement le chasseur, et conduisez-moi près de votre maître.

— Dites-moi au moins votre nom, afin que je vous annonce, car mon maître ne reçoit pas ainsi le premier venu, surtout à une pareille heure.

— Dites-lui que Sans-Peur a besoin de lui parler immédiatement.

Le valet s’éloigna, mais sans inviter le chasseur à entrer.

M. de Vorcel ne fut pas peu étonné en apprenant que celui qui venait troubler son sommeil était le célèbre Sans-Peur, qu’il connaissait d’ailleurs beaucoup, car M. de Montcalm employait les chasseurs comme batteurs d’estrade ; et Sans-Peur était le préféré du général en chef, qui l’avait, quelques jours avant, chargé d’une mission importante. Comme toutes les suppositions qu’il aurait pu faire ne lui auraient pas appris le motif de cette visite nocturne, il donna l’ordre qu’il fût introduit dans sa chambre à coucher.

— Pourquoi diable venez-vous me réveiller ainsi ? lui demanda-t-il d’un ton bourru.

— Mon colonel, dit gravement Sans-Peur, un grand malheur vient d’arriver à la villa.