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LA CHASSE AUX BANDITS

Mon colonel, dit Joseph Dufour, qu’ordonnez-vous ? Vous êtes ici chez vous.

— Aussi vais-je en abuser, car vous serez obligé de nous offrir l’hospitalité jusqu’à demain. Faites donc conduire les chevaux à l’écurie. Les pauvres bêtes doivent être exténuées.

Le fermier se tourna vers ses serviteurs, groupés à quelques pas.

— Mes enfants, leur dit-il, emmenez ces chevaux et prenez-en soin comme s’ils étaient de la famille. C’est en venant nous secourir qu’ils se sont fatigués, il faut leur en savoir gré.

Puis s’adressant aux chasseurs :

— Camarades, leur dit-il, la maison est à vous ; faites-en ce que vous voudrez.

— Que faisons-nous des prisonniers ? dit Sans-Peur en s’approchant du colonel.

— Nous les jugerons après le souper.

— Le tribunal n’aura pas longtemps à siéger, car les débats seront courts.

— C’est probable : mais nous devons agir ainsi pour prouver que nous sommes des justiciers et non des assassins.

Pendant que chacun se livrait à la joie, Taréas parcourait le champ de bataille, scalpant consciencieusement les morts et les blessés. Tous les hommes du colonel étant sains et saufs, il opérait à coup sûr, certain de n’avoir affaire qu’à des ennemis.

Les prisonniers suivaient d’un œil morne cette lugubre opération.

Sur l’ordre du colonel, ils furent conduits dans un angle de la cour et gardés à vue par une douzaine de chasseurs, pistolet au poing.

La ferme regorgeait de provisions de toutes sortes ; aussi les cuisines furent-elles bientôt mises sens dessus dessous par les serviteurs, à qui leur maître avait recommandé de préparer un repas pantagruélique, car il connaissait l’appétit proverbial de ses anciens compagnons.