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le chef des hurons

Les serviteurs, tous Canadiens, c’est-à-dire Français, vaquaient gaiement à leurs occupations respectives. Les uns déballaient les provisions, pendant que les autres soignaient les animaux.

Joseph Dufour allait et venait, promenant sur tout et sur tous ce regard du maître soucieux du bon ordre. Mais hâtons-nous de dire que sa présence ne gênait en rien les serviteurs, qui, tous, l’aimaient et le respectaient, car il savait unir la bonté à la sévérité.

Charles et Gabriel étaient partis depuis plus de deux heures. Le soleil était couché ; le crépuscule couvrait déjà la plaine et ils ne paraissaient point.

Bientôt l’inquiétude du père devint si grande qu’il se fit seller un cheval, avec l’intention d’aller à la découverte.

Il mettait le pied à l’étrier, quand un de ses fils l’arrêta.

— Regardez, père, dit-il en étendant le bras du côté du bois.

— Que signifie cela ? murmura Joseph Dufour avec une certaine agitation.

Ce qu’il voyait était bien fait pour motiver cette émotion : ses fils avançaient lentement, portant un brancard fait de branchages, sur lequel un homme était étendu sans mouvement.

Dix minutes plus tard, Charles et Gabriel entraient au campement et déposaient doucement leur brancard sur le sol.

Leur père se pencha vivement sur l’inconnu, qui ne donnait plus signe de vie.

— C’est un jeune homme ! s’écria-t-il.

— Tu pourrais dire presque un enfant, dit la mère, qui avait, elle aussi, examiné l’étranger.

— Est-il blessé ? demanda le père.

— Non ; dit Charles. Nous l’avons visité avec soin, et son corps ne porte aucune trace de blessure.

— Alors, il est évanoui.

Tout à coup, Mme Dufour pâlit.

— Oh ! mon Dieu ! gémit-elle.

— Que veux-tu dire ? demanda vivement son mari.