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mais tu n’as pas voulu les suivre… Te les rappelles-tu seulement ?

Et comme le comte se taisait, pâle de colère et les dents serrées, il continua :

— Lorsque tu eus racheté ton hôtel, que te dis-je ? Que tu devrais renoncer à ta folle existence d’antan et tenir noblement ton rang dans le monde où ta fortune reconstituée te marquait une place… Dans quelque temps, tu eusses épousé une jeune fille de bonne noblesse, car les gens de ta caste tiennent à ces sortes de principes. Au lieu de cela, tu t’es mis à courir les salons et les clubs, racontant à tous notre expédition qui, à force de passer de bouche en bouche, a fini par être considérée comme invraisemblable. On est venu chez toi, ce soir, par pure curiosité, et tout en mangeant tes sandwichs au caviar et en buvant ton champagne, on ne tarissait pas en calomnies sur ton compte… J’ai même vu le moment où l’on allait te soupçonner d’être chef d’une bande de brigands, ajouta Vernier en riant.

— Tout ce que tu viens de me dire est bien vrai, n’est-ce pas ? fit le comte en posant ses mains sur les épaules de son ami.

— Je t’en donne ma parole d’honneur ! fit gravement ce dernier.

— C’est bien, dit le jeune homme en marchant d’un pas agité par le salon.

— Maintenant, que comptes-tu faire ? interrogea Vernier, inquiet de cette nervosité.

— Ce que je compte faire ! s’écria le comte, d’un ton véhément… Demain, nous partirons pour Fixin, où se