Page:Ville - Au Klondyke, 1898.djvu/46

Cette page a été validée par deux contributeurs.
48
au klondyke

En arrivant sur le terrain que l’on devait exploiter, les deux amis furent très étonnés de ne pas ressentir l’émotion qui les avait précédemment agités ; mais en revanche les matelots se mirent à chanter et danser comme s’ils étaient en proie à une véritable frénésie.

— De l’or !… De l’or !… hurlaient-ils sur les airs les plus variés.

Les deux amis souriaient de cette folie passagère dont ils avaient eux-mêmes ressenti les premières atteintes, mais ils ne pouvaient s’empêcher de faire quelques réflexions philosophiques sur cette étrange influence magnétique de l’or, pour la possession duquel tant de crimes se commettent, comme aussi tant de belles actions.

Les indigènes, plus calmes que les matelots, se contentaient d’exprimer leur satisfaction par des regards brillants de convoitise.

Comme tout a une fin, l’exaltation aussi bien qu’autre chose, les chants et les danses cessèrent enfin, et l’on put procéder à l’installation définitive du campement.

Quoique cette contrée fût absolument déserte, le capitaine Vernier n’en prit pas moins de minutieuses précautions afin d’être prêt à toute éventualité. Pendant que les indigènes déchargeaient les chariots, les hommes de l’équipage abattaient quelques arbres rabougris qui poussaient çà et là, comme à regret, et les amoncelaient près du camp.

Ce soir-là, les matelots soupèrent joyeusement, ce qui ne leur était pas arrivé depuis qu’ils avaient quitté le Caïman. Après le repas, lorsque les pipes furent allumées, les propos les plus extravagants, les projets les plus in-