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l’installation

— Certainement ; mais puisqu’il en est autrement, je dois en prendre mon parti. D’ailleurs, mon maître est-il plus heureux que moi ?… Si nous sommes ici, c’est que le bon Dieu l’a voulu ; inclinons-nous donc devant sa volonté.

— Bien parlé, mon garçon, dit Vernier en frappant amicalement sur l’épaule de Valentin, et je donnerais beaucoup pour que ton maître raisonnât comme toi. Ah ! si j’étais certain que tous mes hommes fussent aussi résignés que tu l’es, je ne serais pas aussi inquiet.

— Que craignez-vous donc, monsieur Vernier ?

— Rien, mon ami, rien, dit vivement le capitaine, qui craignait d’alarmer le comte.

Celui-ci, l’œil fixe, semblait complètement étranger à cette conversation. Sa pensée avait franchi d’un bond l’immensité glacée et s’était envolée vers la France, où elle vagabondait en liberté.

La porte de la case, en s’ouvrant, l’arracha à son rêve, et deux matelots entrant, chargés de planches, achevèrent de le rappeler à la navrante réalité.

Il poussa un profond soupir et se retira dans le réduit qui lui servait de cabine.

Vernier le regarda s’éloigner en murmurant :

— Cœur faible, homme sans énergie, combien tu dois souffrir !

Et il sortit de la case, pour aller rejoindre ses matelots à bord du Caïman.