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l’installation

Chacun se demandait à quoi pourrait bien servir la vapeur, mais l’incertitude cessa lorsque Vernier eut fait transporter et planter en terre un mât de rechange et que, en haut de ce mât, il eut fait accrocher le réflecteur électrique.

— Qui comptes-tu donc éclairer ainsi ? lui demanda le comte lorsque la projection lumineuse creva les ténèbres.

— Qui sait si un autre navire n’est pas, comme le nôtre, cerné par les glaces et à peu de distance ? Dans ce cas, notre feu peut être aperçu et, quand viendra le dégel, ceux qui l’auront vu nous signaleront dans les ports où ils se rendront.

— S’il y a un navire en vue, bien entendu.

— Parfaitement.

— Et si, plus heureux que nous, il s’en tire.

— Naturellement.

— Ce sont des espérances, somme toute.

— Eh ! mon cher, il ne nous reste que cela. L’espoir, vois-tu, c’est la dernière chose qui s’éteint dans le cœur de l’homme.

Tout le monde s’était enfermé dans la baraque, où, grâce à la machine, régnait une douce température. Néanmoins, Vernier avait recommandé à ses hommes de ne pas rester inactifs afin de conserver toujours une certaine chaleur naturelle, ce qui vaut mieux que la chaleur artificielle.

Cependant le froid qui augmentait d’intensité commençait à s’introduire dans la case, malgré le foyer de la machine, et chacun songeait avec terreur au moment où le mécanicien jetterait dans la fournaise sa dernière pelletée de charbon.