NOTES
ET ÉCLAIRCISSEMENTS.
I. L’ORIGINE ET LE SENS DES PIÈCES.
LA MARÉCHALE D’ANCRE.
On a vu (Théâtre, t. Ier) quelle part Vigny entendait prendre au mouvement d’émancipation de la scène française : en initiant à un Shakespeare transposé le public parisien, n’inspirerait-on pas une émulation féconde à la littérature dramatique, un goût plus relevé et plus vivant aux spectateurs habituels des Regulus et des Clytemnestre ? Audace assurément — on l’avait vu le 24 octobre 1829 — mais timidité malgré tout, puisque le poète s’abritait derrière le fantôme de Shakespeare. « Détour », disait Sainte-Beuve. « Victoire sans portée », déclarait A. Dumas, dont le drame en prose d’Henri III et sa Cour, dès le 11 février 1829, avait pu sembler autrement radical. Et le succès d’Hernani, le 25 février 1830, devait rallier la jeunesse autour d’une œuvre se réclamant des mêmes libertés d’Othello sans s’autoriser simplement d’un grand nom étranger : Vigny ne paraîtrait-il pas à visage découvert, comme l’un des champions déclarés du drame nouveau ?
Des le 2 juin 1830, Boulay-Paty signale que Vigny prépare, sous le titre La Maréchale d’Ancre, une « tragédie » ; l’auteur de Cinq-Mars trouve aisément dans ses souvenirs, dans les lectures faites jadis pour son roman, une matière possible : il faut noter qu’une pièce de même sujet et de même titre, par P. Lacroix, drame historique en cinq