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à tous les yeux, met tellement en lumière leurs moindres actes qu’il serait malheureux de n’y pas voir reluire quelque chose de passable. Dans l’un ce fut tel plaidoyer hypocrite ; en l’autre, telle ébauche de système, tous deux donnant un faux air d’orateur et de législateur ; informes ouvrages où le style, empreint de la sécheresse et de la brusquerie du combat qui les enfantait, singe la concision et la fermeté du génie. Mais ces hommes gorgés de pouvoir et soûlés de sang, dans leur inconcevable orgie politique, étaient médiocres et étroits dans leurs conceptions, médiocres et faux dans leurs œuvres, médiocres et bas dans leurs actions. — Ils n’eurent quelques moments d’éclat que par une sorte d’énergie fiévreuse, une rage de nerfs qui leur venait de leurs craintes d’équilibristes sur la corde, et surtout du sentiment qui avait comme remplacé leur âme, je veux dire l’émotion continue de l’assassinat.

Cette émotion, monsieur, poursuivit le Docteur en se croisant les jambes et prenant une prise de tabac plus à son aise, l’émotion de l’assassinat tient de la colère, de la peur et du spleen tout à la fois. Lorsqu’un suicide s’est manqué,