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vue, une partie du magique ascendant par lequel il avait fasciné le monde. — Cependant ce fut plutôt l’idée gigantesque de la guerre qui désormais m’apparut, que celle de l’homme qui la représentait d’une si redoutable façon, et je sentis à cette grande vue un enivrement insensé redoubler en moi pour la gloire des combats, m’étourdissant sur le maître qui les ordonnait, et regardant avec orgueil le travail perpétuel des hommes qui ne me parurent tous que ses humbles ouvriers.

Le tableau était homérique, en effet, et bon à prendre des écoliers par l’étourdissement des actions multipliées. Quelque chose de faux s’y démêlait pourtant et se montrait vaguement à moi, mais sans netteté encore, et je sentais le besoin d’une vue meilleure que la mienne qui me fît découvrir le fond de tout cela. Je venais d’apprendre à mesurer le Capitaine, il me fallait sonder la guerre. — Voici quel nouvel événement me donna cette seconde leçon ; car j’ai reçu trois rudes enseignements dans ma vie, et je vous les raconte après les avoir médités tous les jours. Leurs secousses me furent violentes, et la dernière acheva de renverser l’idole de mon âme.

L’apparente démonstration de conquête et de débarquement en Angleterre, l’évocation des souvenirs de Guillaume le Conquérant, la découverte du camp de César, à Boulogne, le rassemblement