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LES DESTINÉES.


Comment se garderaient les profondes pensées
Sans rassembler leurs feux dans ton diamant pur
Qui conserve si bien leurs splendeurs condensées ?
Ce fin miroir solide, étincelant et dur,
Reste des nations mortes, durable pierre
Qu’on trouve sous ses pieds lorsque dans la poussière
On cherche les cités sans en voir un seul mur.

Diamant sans rival, que tes feux illuminent
Les pas lents et tardifs de l’humaine Raison !
Il faut, pour voir de loin les Peuples qui cheminent,
Que le Berger t’enchâsse au toit de sa Maison.
Le jour n’est pas levé. — Nous en sommes encore
Au premier rayon blanc qui précède l’aurore
Et dessine la terre aux bords de l’horizon.