Page:Vigny - Journal d’un poète, éd. Ratisbonne, 1867.djvu/87

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
77
JOURNAL D’UN POÈTE

L’ennui est la maladie de la vie. On se fait des barrières pour les sauter.

——

Quand on se sent pris d’amour pour une femme, avant de s’engager, on devrait se dire : « Comment est-elle entourée ? quelle est sa vie ? « Tout le bonheur de l’avenir est appuyé là-dessus.

——

Cinq-Mars, Stello, Servitude et Grandeur militaires (on l’a bien observé) sont, en effet, les chants d’une sorte de poëme épique sur la désillusion ; mais ce ne sera que des choses sociales et fausses que je ferai perdre et que je foulerai aux pieds les illusions ; j’élèverai sur ces débris, sur cette poussière, la sainte beauté de l’enthousiasme, de l’amour, de l’honneur, de la bonté, la miséricordieuse et universelle indulgence qui remet toutes les fautes, et d’autant plus étendue que l’intelligence est plus grande.

——

Les Français ressemblent à des hommes que je vis un jour se battant dans une voiture emportée au galop. — Les partis se querellent et une invincible nécessité les emporte vers une démocratie universelle.

——