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JOURNAL D’UN POÈTE

selon la vie doit toujours réduire le sentiment au silence, et le silence sera la meilleure critique de la vie.


sujet : l’habeas corpus, le vide des lois (pour la troisième consultation du Docteur noir). — Le Docteur noir rencontre un homme en qui l’orgueil d’être nommé le premier législateur de son temps est devenu une vraie maladie. Il était avocat et avocasse du matin au soir.

Le Docteur lui montre le défaut de toutes les lois en le menant près du lit d’un homme qui meurt en prison, où il a été laissé préventiment neuf mois. Il est reconnu innocent, absous et meurt à l’audience. Dans son agonie, il s’écrie : « Rendez-moi ma santé, mon temps, ma famille, mon bonheur perdu par cette prison. Si je suis innocent, pourquoi donc m’avez-vous tué ? Si je suis innocent, pourquoi ai-je pu être tué sans que vous soyez des assassins ? Si vous êtes des assassins, pourquoi n’y a-t-il pas quelqu’un qui ait le droit de vous mettre en accusation ? »


L’amour physique et seulement physique pardonne toute infidélité. L’amant sait ou croit qu’il ne retrouvera nulle volupté pareille ailleurs, et, tout en gémissant, s’en repaît.