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JOURNAL D’UN POÈTE

J’en ai fini pour toujours avec les gênantes superstitions politiques. Elles seules pouvaient troubler mes idées par leurs mouvements d’instinct. — Si le duc d’Enghien eût été là ou seulement le duc de Berry, j’y serais mort. C’eût peut-être été dommage. Qui sait ce que je ferai !


du 1er août — Le duc d’Orléans est froidement accueilli par le peuple. Ses partisans ont pensé que son nom de Bourbon lui faisait tort. Ils impriment qu’il n’appartient pas aux Capets-Bourbons, mais qu’il est Valois.


10 août — Couronnement de Louis-Philippe Ier. Cérémonie grave. — C’est un couronnement protestant. — Il convient à un pouvoir qui n’a plus rien de mystique, dit le Globe. J’y trouve le défaut radical que le trône ne s’appuie ni sur l’appel au peuple ni sur le droit de légitimité, il est sans appui.

On ferait une bonne comédie des chefs de parti qui l’ont été malgré eux dans les trois premières journées.


21 août — En politique, je n’ai plus de cœur. Je ne suis pas fâché qu’on me l’ait ôté, il gênait ma tête. Ma tête seule jugera dorénavant et avec sévérité. Hélas !