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Mais la porte du temple est ouverte, et l’on voit
Tous ceux que menaçait le poids brûlant du toit :
Tous les Turcs étaient là ; mais, chacun d’eux s’arrête,
Croise ses bras, jetant son fer, lève la tête,
Et sur la mort qui tombe ose fixer les yeux.
Un seul cri de terreur s’élève jusqu’aux Cieux ;
Le dôme embrasé craque, et dans l’air se balance.
« Je les reconnais tous ! » dit-elle. Elle s’élance,
Et sur le seuil fumant monte. « Je meurs ici !
« — Sans ton époux, dit-il. — Mes époux ? les voici !
« Je meurs vengée ! Adieu, tombez, murs que j’implore ;
« Les Cieux me sont ouverts, mon âme est vierge encore ! »
Et le clocher, les murs, les marbres renversés,
Les vitraux en éclats, les lambris dispersés,
Et les portes de fer, et les châsses antiques,
Et les lampes dont l’or surchargeait les portiques,
Tombent ; et dans sa chute ardente, leur grand poids
De cette foule écrase et la vie et la voix.
Long-temps les flots épais d’une rouge poussière
Du soleil et du ciel étouffent la lumière ;
On espère qu’enfin ses voiles dissipés
Montreront quelques Grecs au désastre échappés ;