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« — Tu ne peux pas mourir, puisque je combattrai.
« — Oui, vous serez vainqueur, et pourtant je mourrai !
« Que les vents sont tardifs ! Quel est donc ce rivage ?
« — Héléna, détournons un lugubre présage.
« Bientôt nous abordons : ne vois-tu pas déjà
« La flottante Délos, qu’Apollon protégea ?
« Paros au marbre pur, sous le ciseau docile ?
« Scyros ou bel enfant se travestit Achille ?
« Vers le nord c’est Zéa qui s’élève à nos yeux ;
« Vois l’Attique : à présent reconnais-tu tes cieux ? »



Héléna se leva : « Lune mélancolique,
« Dit-elle, ô montre-moi les rives de l’Attique !
« Que tes chastes rayons dorant ses bois anciens,
« L’éclairent à mes yeux sans m’éclairer aux siens !
« Ô Grèce, je t’aimais comme on aime sa mère !
« Que ce vent conducteur qui rase l’onde amère,
« Emporte mon adieu que tu n’entendras pas,
« Jusqu’aux lauriers amis de mes plus jeunes pas,