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Soldats ! que voulez-vous ? encor ce masque froid ?
Que vous ai-je donc fait ? Le soleil est à moi,
Il ranime ma vie. Ô voyez-la ! c’est elle
Avec qui je veux vivre, elle est là, qui m’appelle ;
Je ne fais pas le mal ; allez, dites au Roi
Q’aucun homme jamais ne se plaindra de moi ;
Que je serai content si, près de ma compagne,
Je puis mener nos jours de montagne en montagne,
Sans jamais arrêter nos loisirs voyageurs ;
Que je ne chercherai ni parens ni vengeurs ;
Et si l’on me demande où j’ai passé ma vie,
Je saurai déguiser ma liberté ravie ;
J’inventerai des jours où je vous cacherai :
Ah ! laissez-moi le Ciel, je vous pur donnerai.
Non…, toujours des cachets… Je suis né votre proie…
Mais je vois mon tombeau, je suis ravi de joie,
Car vous ne m’aurez plus, et je n’entendrai plus
Les verroux se fermer sur l’éternel reclus.
Que me veux donc cet homme avec sa robe sombre ?
De quelque prisonnier sans doute que c’est l’ombre ;
Il pleure. Ah ! malheureux ! est-ce ta liberté ?