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II


Pour bien se rendre compte de l’état d’esprit dans lequel se trouvait madame d’Ormessant en refermant sur elle la porte de sa chambre, et pour juger la situation telle que venaient de la faire les mots « irréparables » prononcés dans cette soirée, il faut remonter à l’origine des choses et entrer dans les cœurs, les esprits et les consciences. Il faut aussi esquisser d’un trait net les situations indiquées par ce qui précède.

Madame d’Ormessant était la fille unique d’un député influent. Chacun sait ce qu’était, en 1845, l’importance d’un député qui tenait un cinquième de la Chambre dans sa main. M. Langlois idolâtrait sa fille. Il était veuf, disait-on ; d’autres murmuraient tout bas une histoire d’amour : un roman dénoué par la mort. Toujours est-il que Lucie avait réuni sur sa jolie tête tous les souvenirs et toutes les espérances de son père. Mais le député n’était pas seul à aimer Lucie : elle était si gracieuse, si bonne et si puissante, l’enfant gâtée !

Un mot d’elle pouvait ouvrir de vastes horizons à un ambitieux, et, dans ses petites mains, à seize ans, elle tenait le sort de bien des solliciteurs. Aussi,