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phrase d’amour, ne lui semblaient pas employés dans leur véritable acception, ni répondre, même succinctement, aux sentiments et aux idées de la lettre de la veille. Alors elle tombait dans des interrogations et des recherches infinies ; elle voulait extraire d’une phrase vulgaire une idée sublime, dépouiller le fruit de son écorce de bois ou de paille, et en aspirer le suc délicieux, découvrir enfin, pour s’en enivrer et y répondre, les mille intentions délicates et passionnées de Pietro.

Son amant était pour elle une sorte de problème dont la solution l’attirait et l’effrayait en même temps. Sans cesse l’âme de cet amant lui échappait. Elle ne pouvait ni la saisir ni la pénétrer. C’était comme quelque chose de trop grand ou de trop petit pour qu’elle pût le mesurer avec son âme à elle, qui devenait le terme de comparaison.

Les échecs constants contre lesquels venaient se briser tous ses efforts, irritaient ce besoin d’assimilation, qui est le principal mobile de l’amour. Trompée sans cesse dans ses aspirations intellectuelles, elle s’indignait, elle se révoltait elle s’efforçait de mille manières. On eût dit qu’elle tournait autour d’un bloc de granit, le frappant sans cesse et de tous les côtés, pour trouver une place sonore qui résonnât et répondît au coup