Page:Vignon - Un drame en province - La Statue d Apollon.djvu/290

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tu me le dises… non ! Je ne te le demande pas !…

» N’ai-je pas lu ton génie dans tes yeux ? et l’admiration des autres est-elle donc nécessaire à la mienne ? Il me semble, au contraire, que je voudrais me cacher avec toi dans une retraite inaccessible, pour y jouir, moi seule, de la poésie qui s’exhale de tes regards et de tes paroles…

» Est-il besoin, pour se connaître, de savoir l’un sur l’autre tout ce que sait le vulgaire, c’est-à-dire tout ce qui est le faux, le masque, la convention sociale ?… Les âmes se révèlent-elles pas mieux, au contraire, sous les idées préconçues qui les cachent comme des langes. Ne sais-je pas que tu es noble comme tu es beau, et grand comme tu es poëte ?… Et moi ! n’as-tu pas senti que je te donnais mon premier et mon seul amour… »


XLII


Depuis lors, les journées de la comtesse s’écoulèrent, en partie, à écrire de longues lettres bien passionnées, bien éthérées, et à lire de laconiques réponses sous lesquelles elle cherchait un sens mystérieux. Ces billets donnaient à son imagination un thème d’autant plus fécond que les mots si simples, qui forment une banale