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— Triste ! vous trouvez le séjour de Morelay triste ? s’écria le mari avec un accent d’étonnement et de douleur. Nous y avons pourtant passé de bien belles années, Louise… des années heureuses… pour moi, du moins…

— Pourquoi me conduisez-vous dans des pays enchantés ? vous me gâtez, mon ami ! Est-ce qu’il y a du soleil ailleurs, quand on a vu celui-ci disparaître derrière la mer, avec ce fracas et cet éclat qui font songer à l’incendie des villes bibliques ? Est-ce que l’on peut trouver beaux nos horizons bornés, et doux notre air natal, quand on a vu cette immensité de ciel et de mer, et respiré ces brises embaumées ?…

— La Touraine a pourtant de magnifiques parcs et de riches campagnes. Louise, n’oubliez pas trop notre nid patrimonial ; je ne sais pourquoi, mais vos paroles de tout à l’heure m’ont peiné. Il n’est plus rien, pour vous, le toit béni où nous nous sommes aimés dans le recueillement et dans la paix… où nos enfants sont nés ?…

— S’ils étaient nés ici, quel sang plus ardent et plus riche coulerait dans leurs veines ! Ils seraient beaux comme des dieux, ils auraient du génie !…

— Oh ! reprit le comte avec un sourire demi-railleur, j’espère que notre fils sera un homme de cœur