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Par un instinct rapide, elle fit un pas en avant pour éviter que l’attention de son mari ne se fixât sur le jeune homme ; mais, après avoir mis le comte hors de vue, elle ne résista pas au besoin d’admirer cet inconnu qui depuis la veille régnait dans son cœur.

Oui, régnait ! — Car toutes les pensées, toutes les impressions de la belle comtesse, venaient de lui. D’un second coup d’œil elle aperçut, dans l’atelier, un autre homme dormant aussi, adossé au même groupe de marbre ; elle aurait voulu regarder encore les statues et tout l’intérieur de l’atelier ; mais le comte continuait sa course ; il fallait le suivre. Elle passa.

Cependant une diabolique tentation la prit de revoir encore son poëte une seconde ! « Ce sera la dernière fois, se dit-elle ; oui, je me le jure à moi-même ! Je n’arrêterai plus une seule fois mes yeux sur lui. »

Elle courut comme si elle eût oublié quelque chose, arriva jusqu’à la porte de l’atelier, s’arrêta à l’angle sans oser avancer jusqu’au seuil, allongea le cou…

Mais, en cet instant précis, il ouvrit les yeux.

Elle recula d’un mouvement plus rapide que la pensée ; il bondit jusqu’à elle…