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ans du comte sur son front dénudé, aux cheveux gris de ses tempes, à la rudesse de sa barbe, aux plis marqués autour de ses yeux ; à ce je ne sais quoi qui trahit, par les soins mêmes de la toilette, le besoin de cultiver un reste de jeunesse.

Jusqu’alors, pour elle, le mari jeune et charmant qu’elle avait épousé était resté le même ; les changements successifs qu’apportaient les années passaient inaperçus. Elle les découvrit alors d’un seul coup ; et, sans songer que le comte et elle avaient vieilli ensemble, sans se souvenir que les années écoulées avaient été douces, il lui prit une sorte d’oubli du passé et de dégoût de l’avenir.

La perspective de retourner à Paris, d’y passer un mois à faire quelques arrangements de ménage, à rendre quelques visites, puis, d’aller passer quatre ou cinq mois dans son château de Touraine, entre son mari et ses enfants, lui parut si dénuée d’intérêt et d’imprévu, qu’elle ne put retenir un bâillement.

— Excusez-moi, mon ami, dit-elle ; j’ai mal aux nerfs ; ce sera la fatigue, ou l’odeur des lauriers, qui est très-forte sur la promenade. Je vais me coucher, et demain matin je m’éveillerai guérie.