Page:Vignon - Un drame en province - La Statue d Apollon.djvu/130

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La marquise suivait sa fille, et elle la regardait, d’un intraduisible regard, marcher au soleil sous son grand chapeau de paille, s’arrêter, de moment en moment, pour cueillir une fleur au bord des talus, traverser enfin, comme une fée, ce radieux décor de printemps plein de parfums, de brises douces, de verdure, de fleurs et de lumière, qui semblait fait tout exprès pour lui servir de cadre.

Que tout cela était beau !… Les condamnés à mort, lorsqu’ils contemplent la nature une dernière fois, en marchant au supplice, doivent lui trouver des splendeurs inconnues, et découvrir, tout à coup, des sens cachés à ses merveilles. Ainsi faisait Mme de Fayan, qui songeait que son sort se jouait en ce moment, et dont l’âme, en proie à des terreurs intenses, s’ouvrait pourtant à un charme délicieux. Il lui semblait rêver du paradis, sur un lit de camp, dans une forteresse assiégée, tandis que brûlait la mèche de la soute aux poudres.

Quand la mère et la fille arrivèrent à la chaumière de Jacquelette, elles trouvèrent tous les enfants sous la garde de l’aîné. Le père était aux champs, comme d’ordinaire, et la mère à causer dans le village, probablement.

On pense qu’elle avait beaucoup à dire depuis son