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CRÉOLES ET MÉTISSES

de la rue, elle peut, sans faire un pas, arrêter les cavaliers et causer avec eux. C’est ainsi, publiquement, qu’on se fait la cour, en la calle.

Son pied mignon est incapable d’endurer la moindre chaussure. En voiture, elle le pose sur le bord de sa volante, et l’œil curieux admire la finesse du riche soulier ; mais, sous le talon, ce soulier est écrasé et renversé en pantoufle. Aussi, sous aucun prétexte, ne descend-elle de voiture. C’est là que, arrêtée devant les cafés ou les magasins de modes et de nouveautés, elle consomme glaces et sorbets ou choisit les chiffons qu’un commis complaisant vient soumettre à son examen.

Ces volantes, les seules voitures dans lesquelles puisse se montrer une élégante à la Havane, sont aussi remarquables par la bizarrerie de leur construction que par le luxe de leurs ornements et le costume de ceux qui les conduisent. À la fois meubles et bijoux, leurs marchepieds, leurs ressorts, leur caisse, leurs harnais, leurs brancards, leurs roues mêmes, sont incrustés, parsemés de métaux précieux. Savez-vous où l’on va chercher une volante avant de l’atteler ? Où elle se remise, après avoir été nettoyée avec le plus grand soin, la promenade terminée ?… Au salon, dont elle est le meuble principal, occupant une place énorme.

À Porto-Rico, les créoles moins paresseuses courent volontiers par les