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FAMILLE CHINOISE

seulement l’application d’une étrange conception esthétique, mais une satisfaction accordée à des préférences érotiques. Les Célestes sont portés à établir une corrélation entre la forme du pied d’une femme et celle de certains de ses charmes qu’ils apprécient le plus. Aussi les « lis d’or » — c’est le nom que l’on donne aux petits pieds convenablement comprimés — ont-ils excité l’enthousiasme des amants de la Vénus chinoise, par qui fut maudit le récent décret impérial supprimant désormais cette mutilation.

D’autre part, une pudeur très spéciale interdit aux femmes de laisser voir leurs extrémités inférieures.

Dès l’âge de six ans, les pieds de la fillette étaient entourés de bandelettes afin d’en entraver le développement, les doigts étant ramenés sous la plante. C’est ainsi que la jambe d’une jeune femme, depuis le genou jusqu’à la cheville, perdait toute forme, que le mollet disparaissait et que le cou-de-pied restait comme désarticulé : les quatre doigts, repliés par-dessous et complètement aplatis, semblaient unis à la plante ; seul, l’orteil conservait à peu près sa place et son aspect naturel. La marche régulière devenait alors impossible ; la femme ne pouvant avancer qu’à petits pas rapides et chancelants, en s’aidant de ses bras comme d’un balancier, allure que les poètes ont comparée au « balancement du saule sous le souffle du zéphir ».