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une cascade de feu qui parcourait l’espace de quatre à cinq milles. Une autre bouche du cratère placée plus bas était aussi enflammée ; celle-ci produisait une fumée rouge et dorée, qui complétait le spectacle d’une manière effrayante et sublime. La foudre qui partait du centre de la montagne, faisait retentir tous les environs, au point que la terre tremblait sous nos pas. J’étais bien un peu effrayée ; mais je n’en témoignais rien à cause de ma pauvre petite qui me disait en pleurant « Maman, faut-il avoir peur ? » D’ailleurs, j’avais tant à admirer que ce besoin l’emportait sur mon effroi. Imaginez que nous planions alors sur une immensité de brasiers, sur des champs entiers que ces laves, dans leur course, mettaient en feu. Je voyais ces terribles laves brûler les arbrisseaux, les arbres, les vignes ; je voyais la flamme s’allumer et s’éteindre, et j’entendais le bruit des broussailles voisines qu’elles consumaient.

Cette grande scène de destruction a quelque chose de pénible et d’imposant, qui remue fortement l’ame ; je ne pouvais plus parler en reve-