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C’étoit le vieux d’Estaing, héros de la Grenade,
Biron, dont les amours, ainsi que les hauts faits,
Nous rappeloient Alcibiade ;
C’étoit le vieux Luckner, Dillon, et Beauharnais,
Et le vainqueur d’Hondschote, et le vaillant Custine ;
Et dans leurs rangs se montroit l’héroïne,
Qui punit de Marat les horribles forfaits.
Là, ceux qu’avoit absous la royale clémence,
Les Vergniaud, les Brissot, Fonfrède et Gensonné,
Grâce à leur repentir, soutenoient la présence
Du roi qu’ils avoient condamné.
Mais loin de cette cour, dans le fond du bocage,
De leurs remords lui refusant l’hommage,
Se cachoient les Vincent, les Hébert, les Ronsin,
Le féroce Danton, l’exécrable Chaumette,
Et celui qui, du trône enviant la conquête,
Croyoit par des forfaits s’en ouvrir le chemin ;
Tandis que, redoutant et fuyant leur colère,
Dans la sombre épaisseur d’un bois plus solitaire,
Promenant sur la foule un farouche regard,
Le fantôme de Robespierre,
Comme un tigre dans son repaire,
Avec ses compagnons rugissait à l’écart.
De cette fête solennelle,
Descloseaux contemploit l’horrible majesté ;
Et l’on dit qu’en voyant ce serviteur fidèle,
L’ombre du roi martyr daigna payer son zèle
Par un sourire de bonté.