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Je me débattrois dans la chaire ;
Je vivrois sans péril au fond du sanctuaire ;
J’ai couru les camps et les mers.
Mes pénitents et mes dévotes
Auraient soigné mon lit, ma table et mon caveau ;
J’ai vécu fort souvent de racines et d’eau ;
Et dormi sans quitter mes bottes.
Je prêcherais les rois ; et, grâce à mon surplis,
A mes conseils peut-être ils daigneraient souscrire.
J’en rime quelquefois qu’ils ne daignent pas lire ;
Et celui qui m’a lu se rit de mes avis.
J’ai tourmenté de pauvres hères,
Qui portoient leur métier et leurs biens sur le dos ;
J’aurais tourmenté des bedeaux,
Des sacristains et des vicaires.
Pour mon oracle journalier
J’aurais pris la Gazette ou la Quotidienne ;
J’en lis souvent une douzaine ;
Et ne sais auquel me fier.
L’Église a quelquefois enrichi ses apôtres ;
Bellone et les neuf sœurs n’ont pas grossi mes biens.
J’absoudrais les péchés des autres ;
Et personne aujourd’hui ne me passe les miens.
Mars, Talma, Duchesnois, font souvent mes délices ;
Je les aurois maudits et bannis du tombeau.
J’admire Voltaire et Rousseau ;
Je les aurois brûlés ainsi que leurs complices.
J’ai combattu, sans trop savoir pourquoi,