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DE TORMÈS

Tous se jetèrent à genoux, et, devant l’autel, avec les prêtres, commencèrent à chanter à voix basse une litanie, tandis que monsieur mon maître, prenant la croix et l’eau bénite, alla auprès de l’alguazil, sur le corps duquel il chanta ; puis, levant au ciel ses mains et ses yeux, dont on ne voyait presque plus rien qu’un peu de blanc, commença une oraison, non moins longue que dévote, qui fit pleurer toute l’assistance (comme il arrive coutumièrement aux sermons de la Passion, lorsqu’ils sont prêchés par un dévot prédicateur à un auditoire dévot), suppliant Notre-Seigneur, qui ne veut pas la mort du pécheur, mais sa vie et son repentir, de pardonner et de donner vie et santé à ce malheureux, induit par le démon et sollicité par la mort et le péché, afin qu’il se repentît et confessât ses fautes.

Cela fait, il commanda d’apporter la bulle, qu’il mit sur la tête de l’alguazil. Aussitôt le pécheur commença à se sentir mieux et peu à peu reprit connaissance. Et, lorsqu’il fut bien retourné en son bon sens, il se jeta aux pieds de M. le Commissaire et lui demanda pardon,