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LAZARILLE

lâchée, et dont une moitié sortait et se trouvait dans la même position que lorsque j’en sifflais. Consterné à l’aspect de cette clef, le tueur de couleuvres la considéra, et, me la tirant toute hors de la bouche, vit ce qui en était, car, par les gardes, elle ne différait en rien de la sienne. Il alla aussitôt l’éprouver, et, par ce moyen, prouva le méfait. C’est alors que dut dire le cruel chasseur : « Le rat et la couleuvre qui me donnaient guerre et mangeaient mon bien, je les ai trouvés. »

De ce qui advint pendant les trois jours suivants, je ne certifierai rien, vu que je les passai dans le ventre de la baleine ; mais ce que je viens de vous conter, je l’ouïs dire, après avoir repris connaissance, à mon maître, qui, à tous ceux qui venaient s’informer, relatait le cas tout au long.

Au bout de trois jours, je revins à moi et me trouvai couché sur ma paillasse, la tête toute emplâtrée et couverte d’huiles et d’onguents. Étonné, je dis : « Qu’est ceci ? » — « Ce sont, » me répondit le cruel prêtre, « les rats et les couleuvres qui me ruinaient et que j’ai chassés. »