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mari avait été envoyé comme prisonnier de guerre, nous nous rendîmes de notre côté à Lille : j’y passai ma convalescence. Comme Delphine avait une partie de l’argent retrouvé dans l’avoine, nous menions assez joyeuse vie. Il fut question de nous marier, et l’affaire était si bien engagée, que je me mis en route un matin pour Arras, d’où je devais rapporter les pièces nécessaires et le consentement de mes parents. Delphine avait obtenu déjà celui des siens, qui se trouvaient toujours à Gand. À une lieue de Lille, je m’aperçois que j’ai oublié mon billet d’hôpital, qu’il m’était indispensable de produire à la municipalité d’Arras ; je reviens sur mes pas. Arrivé à l’hôtel, je monte à la chambre que nous occupions, je frappe, personne ne répond ; il était cependant impossible que Delphine fût sortie d’aussi grand matin, il était à peine six heures ; je frappe encore : Delphine vient enfin ouvrir, étendant ses bras et se frottant les yeux comme quelqu’un qui s’éveille en sursaut. Pour l’éprouver, je lui propose de m’accompagner à Arras afin que je puisse la présenter à mes parents ; elle accepte d’un air tranquille. Mes soupçons commencent à se dissiper ; quelque chose me disait