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la prison comme suspect. Son retour nous remplit de joie ; nous le croyions sauvé, mais sur le soir on l’appela de nouveau. Joseph Lebon, en l’absence de qui la sentence d’absolution avait été rendue, arrivait de la campagne ; furieux de ce qu’on lui dérobait le sang d’un aussi brave homme, il avait ordonné aux membres de la commission de se réunir immédiatement, et M. de Béthune, condamné séance tenante, fut exécuté aux flambeaux.

Cet événement, que Beaupré nous annonça avec une joie féroce, me donna des inquiétudes assez sérieuses. Tous les jours on envoyait à la mort des hommes qui ne connaissaient pas plus que moi le motif de leur arrestation, et dont la fortune ou la position spéciale ne les désignaient pas davantage aux passions politiques ; d’un autre côté, je savais que Beaupré, très scrupuleux sur le nombre, se souciait peu de la qualité, et que souvent, n’apercevant pas de suite les individus qui lui étaient désignés, pour que le service ne souffrît aucun retard, il envoyait les premiers venus. D’un instant à l’autre je pouvais donc me trouver sous la main de Beaupré, et l’on conçoit que cette expectative n’avait rien de bien rassurant.

Il y avait déjà seize jours que j’étais détenu, quand on nous annonça la visite de Joseph