oignons, de l’huile, une outre de vin, et m’invitait à prendre un repas dont j’avais le plus grand besoin. Il paraissait bien avoir quelque envie de me questionner ; mais je mangeais avec une telle avidité, qu’il se fit, je crois, un scrupule de m’interrompre. Quand j’eus terminé, c’est-à-dire quand il ne resta plus rien sur la table, il me conduisit dans une espèce de grenier, en me répétant que j’étais là bien en sûreté ; puis il se retira sans que je pusse savoir s’il restait dans la bastide, attendu qu’à peine fus-je étendu sur la paille, qu’un sommeil invincible s’empara de moi.
Lorsque je m’éveillai, je jugeai, à la hauteur du soleil, qu’il était deux heures après midi. Une paysanne, sans doute la même dont j’avais vu les atours, avertie par mes mouvements, montra sa tête à l’ouverture de la trappe de mon galetas : « Ne bougez pas, me dit-elle en patois ; les environs sont remplis de sapins (gendarmes) qui furettent de tous côtés. » Je ne savais ce qu’elle entendait par ce mot de sapins, mais je me doutais qu’il ne s’appliquait à rien de bon.
À la brune, je revis l’homme de la veille, qui, après quelques paroles insignifiantes, me demanda directement qui j’étais, d’où je venais,