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lations de ma première campagne. Mon absence ne fut pas de longue durée : trois semaines s’étaient à peine écoulées, que, faute d’argent, la comédienne renonça à me traîner parmi ses bagages. Je revins tranquillement à Arras, et mon père fut confondu de l’aplomb avec lequel je lui demandai son consentement pour entrer au service. Ce qu’il y avait de mieux à faire, c’était de l’accorder ; il le comprit, et le lendemain j’avais sur le corps l’uniforme du régiment de Bourbon. Ma taille, ma bonne mine, mon adresse dans le maniement des armes, me valurent l’avantage d’être immédiatement placé dans une compagnie de chasseurs. Quelques vieux soldats s’en étant formalisés, j’en envoyai deux à l’hôpital, où j’allai bientôt les rejoindre, blessé par l’un de leurs camarades. Ce début me fit remarquer : on prenait un malin plaisir à me susciter des affaires, si bien qu’au bout de six mois, Sans Gêne, c’était le surnom que l’on m’avait donné, avait tué deux hommes et mis quinze fois l’épée à la main. Du reste, je jouissais de tout le bonheur que comporte la vie de garnison ; mes gardes étaient toujours montées aux dépens de quelques bons marchands dont les filles se cotisaient pour me procurer des loisirs. Ma mère