étaient devenus tellement scandaleux, qu’on avait dû la chasser honteusement. Elle était, me dit-on, enceinte d’un avocat de la ville, qui fournissait à peu près à ses besoins ; depuis quelque temps on n’entendait plus parler d’elle, et l’on ne s’en occupait plus.
Je ne m’en occupai pas davantage ; j’avais à songer à bien autre chose. D’un moment à l’autre, on pouvait me découvrir, m’arrêter chez mes parents, que je mettrais ainsi dans l’embarras. Il était urgent de trouver un asile sur lequel la surveillance de la police s’exerçât moins activement qu’à Arras. On jeta les yeux sur un village des environs, Ambrecourt, où demeurait un ex-carme, ami de mon père, qui consentit à me recevoir. À cette époque (1798), les prêtres se cachaient encore pour dire la messe, quoiqu’on ne fût guère hostile envers eux. Le père Lambert, mon hôte, célébrait donc l’office divin dans une espèce de grange ; comme il ne trouvait pour le seconder qu’un vieillard presque impotent, je m’offris à remplir les fonctions de sacristain, et je m’en tirai si bien, qu’on eût dit que je n’avais fait autre chose de ma vie. Je devins également le second du père Lambert, dans les leçons qu’il donnait aux enfants du